Histoire Renault 2.5T gazo

Bonjour à tous,

En cette période de confinement, je vous propose de présenter mon véhicule Renault Galion de 1957 équipé d’un gazogène à bois, son histoire, les améliorations apportées durant ces 5 dernières années ainsi que mon expérience acquise pour conduire un véhicule gazogène.

Très intéressé depuis ma jeunesse par le gazogène (mon père avait passé son permis de conduire avec un camion gazo), j’ai eu l’occasion d’acquérir ce véhicule au moment où s’approchait mon départ à la retraite. Le propriétaire précédent, qui avait utilisé un gazogène pendant la guerre avait conservé une installation gazogène « au cas où ». Ce système gazobois, construit sous licence Imbert, était bien conservé dans son grenier durant environ 60 ans …
A l’âge de 75 ans, ce Savoyard a entrepris de faire revivre le système en le montant sur un véhicule adapté. Il a déniché un Renault Galion de 1957, bien adapté pour installer le montage gazo compact derrière la cabine et compatible avec la cylindrée du moteur. Après le montage, on pouvait apercevoir le véhicule dans diverses manifestations locales en Savoie pendant quelques années. En 2013, je suis devenu l’heureux propriétaire de ce p’tit camion très particulier !

Le p'tit Renault à la station de ski des Saisies en Savoie

La suite au prochain n°

En ces moment de confinement, tes articles viennent à point nommé, une belle histoire ton camion gazo, que tu perpétue, est aussi un jolie geste pour l'histoire nationale

et la mémoire collectif.

Au plaisir de nouveaux articles..........

C’est maintenant l’apprentissage : allumage du générateur, démarrage, essais sur route… Chaque étape doit être apprise, comprise, maîtrisée. Pendant plus d’un an (je n’étais pas encore à la retraite), j’ai appris, essayé, fait, défait, modifié, soudé, car un gazo est un système qui demande de la remise en état constante s’il n’est pas construit en inox, mon système de 1940 ne connaissant pas ce métal… Les premiers essais étaient très compliqués : l'étanchéité des couvercles parfois insuffisante, les multiples perforations, souvent très difficiles à localiser, ont provoqué des entrées d’air rendant les démarrages très délicats. Puis, après de nombreuses réparations, y compris sur le véhicule, le camion tourne avec du bois, et je peux envisager faire le 1er tour d’une vingtaine de km.

De retour de ma 1ère expédition qui m’a permis de tester les performances de mon p’tit camion ainsi que les compétences du conducteur, j’étais satisfait. C’est vrai qu’il faut apprendre à tout gérer : préparation du bois, allumage du générateur et démarrage du moteur, réglage de l’air additionnel, anticiper l’approche d’un croisement en réduisant l’air pour éviter de caler, redémarrer en accélérant en douceur avec augmentation simultanée de l’air (pour éviter de caler à nouveau), etc. En vitesse de croisière, j’ai dépassé les 60 km/h, ce qui n’est finalement pas si mal.

A demain pour la suite...

Le week-end suivant ce 1er essai, en voulant remettre mon « usine à gaz » en route, lorsque je lance le démarreur, le moteur lâche un bruit très inquiétant, puis tourne sans vouloir démarrer faute de compression… Après quelques recherches, je trouve des tiges de culbuteurs tordues, un culbuteur cassé et toutes les soupapes d’admission bloquées. Que s’est-il passé ???
Après un coup de fil en Savoie, l’ancien propriétaire m’a indiqué une piste : la tôle interne du générateur de gaz est probablement percée (encore de la corrosion… !) et le goudron produit inévitablement lors de la distillation du bois, n’est pas totalement détruit car une partie des gaz ne passe pas par l’étranglement du foyer. Ce goudron, liquide à chaud peut arriver jusque dans le moteur, malgré les filtres… Après le refroidissement du moteur, le goudron a probablement collé les soupapes et peut-être les segments…
Après avoir digéré cette nouvelle, j’ai déculassé le moteur de suite pour évaluer les dégâts. Un malheur n’arrivant jamais seul, une vis de culasse grippée s’est cassée dans le bloc. On arrête les frais pour aujourd’hui !

Décidément
Mais on devine un beau camion .

Pour te présenté aussi une histoire de vers ton Pays qui parle de Gazogène.

Le week-end d’après, j’ai fait l’inventaire des dégâts. Au final, les soupapes sont parfaitement récupérables après nettoyage du goudron et un rodage.

 J’ai aussi versé de l’alcool à brûler sur les pistons pour dissoudre le goudron qui aurait pu descendre près des segments. Il me faut un joint de culasse, des vis, des tiges de culbuteur et un culbuteur. J’ai aussi réussi à percer le boulon cassé dans le bloc. S’agissant d’un moteur type Frégate, ces pièces se trouvent assez facilement. D’ailleurs l’ancien propriétaire me propose un moteur complet pour récupération de pièces, mais avec le bloc fendu suite au gel.
Dans la foulée, j’ai déposé le générateur de gaz pour trouver l’origine du problème. Après démontage de la chemise interne, je trouve une vraie passoire avec des centaines de perforations minuscules sur la périphérie et concentrées sur une hauteur de 30 cm (au niveau de la zone de distillation -carbonisation). Cette tôle de 2mm d’épaisseur a déjà été remplacée par le précédent propriétaire et n’aura survécu qu’une dizaine d’années….

Après l’approvisionnement des pièces, le moteur est remonté et essayé en l’alimentant à l’essence. Tout s’est bien passé !

Quant au générateur de gaz, je change de casquette et m’attaque durant les semaines suivantes à la chaudronnerie pour reconstruire correctement le générateur. Roulage d’une nouvelle tôle (un peu plus épaisse), confection de brides pour assurer une jonction étanche entre les 2 chemises et le couvercle, amélioration de l’étanchéité autour de l’entrée d’air à clapet, etc.

Voici le schéma global de mon installation. Vous noterez que le générateur ne comporte pas de grille de décendrage. Ce principe a aussi été utilisé par Berliet.

Quel est l'élément cylindrique vertical entre l'épurateur et le générateur? Un filtre à poussière? Je ne le vois pas apparaitre sur ce schéma .

Réponse : Quel est l'élément cylindrique vertical entre l'épurateur et le générateur? Un filtre à poussière? Je ne le vois pas apparaitre sur ce schéma  

C'est un petit filtre à liège supplémentaire qui augmente la capacité de l'épurateur principal. Il avait été été rajouté par le propriétaire précédent pour améliorer la filtration. Plus tard, j'ai surélevé cet épurateur qui sert surtout à décanter les restes d'eau et j'ai rajouté un gros filtre final à bain d'huile en dessous. Maintenant le gaz est vraiment plus propre. Le schéma de principe ne montre pas tout cela ! C'est une des nombreuses améliorations que j'ai faites durant les 5 dernières années. J’y reviendrai plus tard..

Après ce gros chantier, le moment d’essayer est arrivé. Avec beaucoup de craintes, je refais un tour avec le véhicule. Tout se déroule bien, l'allumage et le démarrage du moteur se passent vraiment mieux et l’engin fonctionne parfaitement.

Le test du gaz !

C'est la 1ère fois que je peux apprécier les vraies performances d'un gazogène qui sont certes en-dessous du fonctionnement à l'essence, mais néanmoins tout à fait acceptables. Au retour, je vérifie de suite s’il y a du goudron dans les tuyauteries. Ouf, plus de goudron. Par contre, je trouve trop de suie (à mon avis) et je pense qu’il faudrait améliorer la filtration.
Mais pour l’instant, ça fonctionne, ce qui n’est déjà pas mal.  
C'est à partir de ce moment que je me risque à participer à des sorties et expositions d'associations de véhicules anciens de ma région où le véhicule suscite la curiosité des visiteurs.

Prêt pour le départ au salon Biobernai 2015 dont le thème était "l'écomobilité". J'ai remporté le 2ème prix !

Au courant des années suivantes, j’ai régulièrement amélioré le véhicule. Voici les 1ères modifications :

• Adjonction d’un réservoir d’essence (qui avait été supprimé) et montage du carburateur d’origine sur la prise prévue sur le mélangeur afin de pouvoir rouler à l’essence ou au gaz de bois. Le passage d’une énergie à l’autre peut se faire à partir du poste de conduite sans ouvrir le capot moteur et sans outillage. Il est même possible de passer du gaz de bois à l’essence en roulant et sans s’arrêter. L’essence, c’est quand même très pratique !

Montage du réservoir d'essence

Mélangeur Zenith et carburateur

2 pédales d'accélérateur !

• Ajout d’un filtre final à bain d’huile pour améliorer la filtration du gaz. J'ai opté pour cette solution, car le principe de filtration est différent par rapport au liège et a donné un bon résultat.

Filtre final à bain d'huile

• Montage d’un allumeur électronique programmable avec 2 courbes mémorisées : une pour le gaz de bois, une pour l’essence. Inversion par un simple interrupteur pour passer de l’une à l’autre. Allumage puissant, super fiable et qui se laisse oublier…

A demain pour la suite !

De belles Photos, on voit que tu as approfondi le sujet, et une parfaite maîtrise du gazo Imbert.

ENCORE...encore....

Quelques autres améliorations :

• Ajout d’un système de conjugaison sur le mélangeur pour automatiser le réglage d’air dès que l’on passe au ralenti et retrouver le réglage de la marche normale à l’accélération. J'ai copié le système (qui existait probablement en option à l'époque) sur une photo trouvée sur Internet. Quel confort de conduite !

Le levier du papillon accélérateur commande l’ouverture de l'air jusqu'à la position prédéfinie par la commande par câble

• Montage d’une sonde Lambda avec afficheur en cabine pour réglage fin de la richesse (très utile en montagne)
• Ajout d’un système de mesure de la dépression, avec 5 points de mesure (sélection par interrupteur rotatif et une batterie de 5 électrovannes) permettant de contrôler, anticiper et localiser le colmatage des filtres ou du foyer.

En haut à gauche, le dépressiomètre et le sélecteur du point de mesure; au-dessus du pare-brise, l'indicateur Lambda, le compte-tours et la température moteur.

Voilà une belle passion,
L’apprentissage, la réflexion, l’amélioration, la modification,
Et rouler, soit gazo ou essence du poste de pilotage
Bravo +++,
Bonne continuation dans cette passion,
Cela me ramène de plus de 25 ans en arrière, histoire de passion.

Raynald a écrit:

Voilà une belle passion,
L’apprentissage, la réflexion, l’amélioration, la modification,
Et rouler, soit gazo ou essence du poste de pilotage
Bravo +++,
Bonne continuation dans cette passion,
Cela me ramène de plus de 25 ans en arrière, histoire de passion.

Merci beaucoup Raynald
Et n'oublie pas que tu m'as transmis ta passion en 2013 !
Quel bon souvenir !

Et on continue...

• Modification de la tuyauterie d’alimentation du gaz (qui traversait la cabine) pour la passer sous la cabine entre le châssis.

Cette tuyauterie n'existe plus et passe maintenant sous le châssis


• Reconstruction du refroidisseur (hiver 2018/19). L'ancien caisson était percé à de nombreux endroits et comportait de plus en plus de "rustines". Les plaques à l'intérieur étaient aussi très fortement corrodées.

Début de la reconstruction. La section carrée est devenue cylindrique, plus facile à réaliser pour moi

Les plaques de choc, avec des perçages de plus en plus petits, 1ères pièces en inox du gazo !

Le 1er allumage après la reconstruction. Les poumons sont propres ! 


• Élaboration d’un panneau explicatif pour détailler le fonctionnement.

Le panneau explicatif avec les réponses aux questions régulièrement posées par les visiteurs

Le moteur au gaz de bois est le plus propre,il faut le dire et le redire, chose que pas beaucoup de personne dans la société sont au courant....

imaginez que vous disposez d'un gazogène dans votre quartier de maison, que vous mettez tout vos déchets dedans, alors vous pouvez imaginez, que la chaleur fatale, vous chauffe avec un réseau de chaleur, que le soir vous branchez votre véhicule électrique et la fourniture de votre électricité dans votre habitation avec assistance de panneaux.....

économie circulaire et impact carbone, on ne peut pas mieux faire.

A quand le rêve qui deviendra réalité.....

Oh !
Super Edward, c’est un honneur pour moi et notre passion,
Quel souvenir !

Cela fait maintenant plus de 5 ans que je suis membre de l’association ACAARE (Amateurs de Camions et Autobus Anciens Région Est). En général nous faisons 3 à 4 sorties par an de 200 à 350 km et j’arrive à rouler normalement avec le convoi de nos vieux PL à une vitesse tout à fait satisfaisante. C’est clair que dans les montées des cols Vosgiens, ça reste un gazo et je suis souvent le dernier, mais 2 ou 3 minutes d’attente en haut du col et je suis là !

Après quelques milliers de km au bois, je peux annoncer quelques chiffres :

• Consommation : environ 35 kg de bois aux 100 km
• Autonomie : 70 km ou 1 heure (le 1er atteint)
• Temps nécessaire pour démarrer le moteur à partir de l’allumage du foyer : 3 – 4 minutes maxi
• Vitesse de croisière 75-80 km/h, vitesse maxi : plus de 80 km/h !
• Échéances nettoyage des filtres : entre 300 et 1000 km selon le type de trajet
• Trajet le plus long effectué d’une traite au bois : 380 km !


Le plein SVP !


ça ronronne !

A demain pour la suite ...

Le carburant du gazo !

La préparation du bois pour un gazogène Imbert est une occupation continuelle si on roule au bois ! En effet, pour un fonctionnement optimal de mon gazo Imbert que l’on peut considérer comme un petit modèle (Ø intérieur de la trémie 37 cm – étranglement du diabolo Ø 8.5 cm), il me faut des blocs de bois qui peuvent aller de la taille d’une petite boite d’allumettes jusqu’à celle d’une grosse boite d’allumettes de ménage. Les plus petits débris ne sont pas gênants en quantité raisonnable. En respectant cette taille des blocs, je n’ai pas de problème de pontage et le fonctionnement est régulier et continu.

Station de ravitaillement

Pour ma part, disposant de bois en bûches de 1 m, je procède par étapes :

• Sciage des bûches en longueurs de 6–7 cm avec une scie à ruban
• Fendage à la hachette sur un billot
• Ensachage dans des sacs-filets à pommes de terre (16-18 kg/sac)
• Stockage pour séchage final

Selon l’ardeur que je consacre à cette tâche, cette opération m’occupe quelques semaines chaque hiver pour préparer le carburant pour la saison à venir.


Fin du sciage, début du fendage !


Bois prêt pour la mise en sacs


Les sacs prêts pour le stockage et séchage final

J’adore cette manière de faire le plein sans taxes carburant !

Petite astuce,
Pour ne pas avoir de pont, le mélange d essence de bois est une très bonne solution.
Dure et léger. Feuillus et résineux.

pour la simple raison, que le plus tendre ce consume plus rapidement que le plus dure, de ce fait, cela, déstructure la voûte et ne ce créée pas.

https://youtu.be/MXaoQ0k9Jlg

Cela fait quelques années que je réfléchis pour faciliter la préparation du bois et surtout pour éviter de me blesser lors du fendage de ces petits blocs à la hachette. Des idées trottent dans ma tête pour un système de fendage mécanique.
J’ai eu l’occasion de récupérer une antique fendeuse, fabriquée probablement avant la 2ème guerre, qui est une bonne base pour mon projet. Le système de coin avec une course de 13 cm semble bien convenir. Après 2 variantes (1ère version avec la machine couchée, la 2ème avec la machine verticale), beaucoup de travail et suite aux essais pas assez concluants, j’ai jeté l’éponge et décidé de ne pas utiliser cette machine. Le principal problème était la force de poussée insuffisante à faible vitesse ainsi que l’alimentation correcte des blocs de bois. En augmentant la vitesse pour mieux utiliser l’inertie du volant, la force était suffisante mais l’alimentation des blocs de bois ne suivait plus… Ici, pas question de mettre les morceaux de bois à la main sous la lame !

L'antique fendeuse, base de mon projet !


Entraînement par moteur hydraulique avec possibilité de varier la vitesse, très utile pour la mise au point


2ème tentative avec machine verticale et alimentation horizontale du bois

Durant l’hiver 2019-2020, j’ai intégralement construit et mis au point une fendeuse que je vous présente aujourd’hui.
C’est une fendeuse hydraulique horizontale de 12T de poussée et qui fait des allers-retours continus sur une course de 10 cm environ. Les blocs de bois à fendre sont alimentés par le dessus et tombent dans la « chambre » de fendage par gravité.  A chaque poussée, jusqu’à 5 morceaux fendus à la bonne taille sortent en dessous. Le cycle complet (aller et retour du vérin) dure moins de 3 secondes… Cette petite machine mobile est alimentée (pour l’instant) avec le circuit hydraulique et électrique d’un tracteur positionné à côté.





La mise au point était toutefois assez délicate, car les blocs avaient tendance à tomber dans le mauvais sens du fil du bois lors de leur descente. J’ai mis au point un système de pince automatique qui a tout résolu. Ce petit bijou a maintenant un rendement tout à fait honorable : en une journée de 8 heures, j’ai scié (avec la scie à ruban), fendu et ensaché environ 1 stère de bois de hêtre. Cela a donné 39 sacs (entre 16 et 18 Kg chacun) soit le carburant pour largement plus de 1500 Km !


le résultat  


lame principale en V et 4 lames radiales inférieures


Lame installée


L'ensachage


Le travail de la journée !

Maintenant, il ne reste qu’à rajouter la scie à chevalet pour compléter la fendeuse qui deviendra ainsi une scie-fendeuse. Peut-être la suite l’hiver prochain !    




Voilà, mon histoire s’arrête pour le moment et j’espère que j’ai pu vous divertir un peu durant cette période de confinement. J’ai moi-même eu beaucoup de plaisir à me remémorer les étapes de cette belle aventure, depuis la trouvaille de cette rareté jusqu’à aujourd’hui. Au fil des ans, j’ai appris beaucoup de choses dans de multiples domaines et cela a été pour moi un enrichissement personnel. J'ai eu le bonheur de rencontrer d'autres passionnés qui m'ont apporté leurs conseils et propres expériences et je tiens à les remercier. J’ai aussi passé quelques étapes plus difficiles, mais j’ai surtout vécu beaucoup de moments de bonheur en faisant revivre ce véhicule. A chaque sortie avec mon  gazo, je pense toujours à nos parents qui, en période de guerre et après-guerre, avaient parfois la chance de rouler en gazogène, l’autre alternative étant d’aller à pied….

Edy alias edward7

PS : pensez à lire la suite en page 2